LOT 038

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1923 - 2002
Canadien

Hibou-carnaval
sculpture en bronze, 1973 - 1986
signé, édition 5/8 et étampé avec la marque de fonderie FB
11 3/4 x 11 5/8 x 6 1/2 po, 29.8 x 29.5 x 16.5 cm

Estimation : 30 000 $ - 50 000 $ CAD

Vendu pour : 79 250 $

Exposition à :

PROVENANCE
Une succession importante de Montréal

BIBLIOGRAPHIE
Yseult Riopelle, Jean Paul Riopelle: Catalogue Raisonné, Volume 5, 1972 - 1979, 2020, reproduit page 522, catalogue #1973.10SC.1973


Le hibou est une figure récurrente dans l’œuvre de Jean Paul Riopelle. S’il apparaît pour la première fois dans le polyptyque Point de rencontre (1963), une œuvre de commande réalisée pour l’aéroport Pearson de Toronto aujourd’hui exposée dans la salle de bal de Rideau Hall, Hibou premier, une huile sur toile datée de 1939-1941, est sa première représentation officielle. Riopelle étudie alors sous la direction d’Henri Bisson. Hibou premier est très éloigné de ce à quoi ressembleront les œuvres futures de Riopelle, mais l’arrière-plan tacheté laisse entrevoir son traitement futur de la couleur. L’artiste a travaillé l’abstraction pendant des décennies, cultivant et affinant son approche unique. Cependant, à la fin des années 1960 et tout au long de la décennie suivante, Riopelle renoue avec la figuration et réintroduit la figure du hibou comme en témoignent des tableaux (Hibou Jet-Black, 1970), des gravures (Les hiboux, 1970) et une série de sculptures dont fait partie la présente œuvre.

Hibou-carnaval représente un hibou – peut-être un grand-duc comme semblent l’indiquer ses deux aigrettes – avec les ailes et la queue ouvertes comme s’il était un paon en train de faire la roue. Les deux plumes s’élancent vers le haut, d’une manière joyeuse et expressive. Comme c’est souvent le cas dans l’œuvre sculpté de Riopelle, Hibou-carnaval a une forme irrégulière et organique, et arbore des textures marquées par les plis et les arêtes des empreintes digitales de l’artiste, qui nous rappelle ainsi sa présence. De profondes stries calligraphiques recouvrent le corps du rapace, comme pour mettre en relief son plumage.

Bien que l’intérêt de Riopelle pour les œuvres tridimensionnelles remonte à son plus jeune âge – d’ailleurs, ses premières sculptures documentées datent de 1947 – ce n’est que dans les années 1960 que cette technique fait partie intégrante de sa pratique. Pour lui, c’est un moyen de rompre avec les habitudes de la peinture et de se reconnecter à l’action viscérale de faire quelque chose de ses mains. Yseult, la fille de Riopelle, explique la technique de son père :

Du bout de ses dix doigts, amoureusement, impétueusement, il marque, pince, façonne la terre malléable puis la fouette et l’estoque du bout de l’outil comme pour dompter sa viabilité. Promptement, l’oisillon du rapace en devenir brise sa coquille et dès sa toute première leçon de vol, d’instinct, rallie le bestiaire fantastique et ludique de l’artiste1.

Riopelle incorpore même des objets trouvés – vieille pelle, creuset, tabouret à trois pieds ou porte-bouteilles – dans ses œuvres en argile : « Frénésie créatrice de Riopelle, sans foi ni loi, tout y passe dans l’atelier…2. »

C’est l’oie qui succède au hibou dans le bestiaire de l’artiste. Pour citer le regretté historien de l’art François-Marc Gagnon : « Toute cette production prenant des volatiles pour thèmes relève moins d’un bestiaire que de l’art cherchant appui dans la nature qui lui sert de prétexte. Pour Riopelle, il n’y a pas de hiatus entre sa production dite abstraite et l’autre, dite figurative. L’une et l’autre relèvent du même acte, du “faire”3. » Riopelle dira : « Par exemple, si on me demande pourquoi j’ai dessiné 2 000 hiboux, je dirai : “C’est pour faire dix lithos.” Mais en réalité, c’est d’avoir fait les 2 000 hiboux qui m’intéresse. Pas parce que ce sont des hiboux. Je me fous des hiboux. Ils ne sont pas pour autant des symboles. Je n’ai pas pensé à ce qu’ils signifiaient lorsque je les ai faits. Je les ai faits4. » Ceci dit, il reste intéressant de s’attarder à ce que représente cet oiseau chasseur nocturne. Le hibou symbolise la sagesse et la spiritualité, mais il est également associé à l’occultisme et à la nuit.

Vivant et profondément expressif plutôt que sérieux et sombre, notre Hibou-carnaval évoque la fête et la convivialité. Les ailes de l’oiseau sont déployées dans un geste d’accueil, pour nous inviter à entrer. La sculpture en argile a été réalisée en 1973 et coulée en 1986. Un autre moulage de Hibou-carnaval se trouve dans la collection du Musée national des beaux-arts du Québec.

1. Yseult Riopelle, « Mémoires d’ateliers » dans Riopelle : mémoires d’ateliers, catalogue d’exposition, Montréal, Hibou Éditeurs, 2010, p. 9.

2. Ibid., p. 11.

3. François-Marc Gagnon, « Les hiboux » dans Jean Paul Riopelle : Sa vie et son œuvre, Toronto, Institut de l’art canadien, 2019, https://www.aci-iac.ca/fr/livres-dart/jean-paul-riopelle/.

4. Cité dans Gilles Daigneault, « Vous avez dit bestiaire ? » dans Yseult Riopelle (dir.), Riopelle, Les migrations du Bestiaire. Une rétrospective, catalogue d’exposition, Montréal, Kétoupa Édition, 2014, p. 13.


Estimation : 30 000 $ - 50 000 $ CAD

Tous les prix affichés sont en dollars canadiens


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