Vendu pour : 511 250 $

PROVENANCE
Acquis directement auprès de l’artiste, vers 1963
L’honorable Hugues Lapointe C.P., OC, DD, QC, député, Québec
Par filiation à la collection privée actuelle, Québec

BIBLIOGRAPHIE
Luc d’Iberville-Moreau, Jean Paul Lemieux, Musée des beaux-arts de Montréal, 1967, reproduit page 50
Anne Hébert, Jean Paul Lemieux: Moscou, Leningrad, Prague, Paris, Ministère des Affaires culturelles du Québec, 1974, reproduit page 30
Guy Robert, Lemieux, 1975, reproduit page 287

EXPOSITION
Musée des beaux-arts de Montréal, Jean Paul Lemieux, 15 septembre - 11 octobre 1967, en tournée en 1967 - 1968 au Musée du Québec, Québec, et au Musée des beaux-arts du Canada, Ottawa, catalogue #62
Musée du Québec, Québec, Jean Paul Lemieux, 1974, en tournée de 1974 à 1975 à Moscou, Leningrad, Prague et Paris, catalogue #14

Dans la galerie de personnages que Jean Paul Lemieux a constituée, il y a Samuel dont l’existence se résume à l’image qu’a bien voulu lui donner le peintre : un corps fragmenté, trop grand pour le format de la toile; une face oblongue et un large front qu’accentue la casquette Gatsby posée sur une chevelure proprement taillée. Les traits du visage de Samuel sont juvéniles et confiants, le regard est perçant et le sourire avenant. Son cou cylindrique est enserré dans le col de chemise paré d’une cravate rouge qui s’harmonise avec la carnation du jeune homme. Le peintre a pris soin de faire courir le vermillon en de minces traits qui définissent le col et qui affleurent légèrement les épaules avant qu’elle ne disparaisse pour laisser place au bleu du gilet et au vert olive du veston.

Sans modèle qui tient la pause, Jean Paul Lemieux a peint ici un portrait fictif, caractéristique du style simplifié qu’il adopte entre 1955 et 1970, sa période la plus célèbre que les historiens de l’art ont convenu de qualifier de « classique ». C’est en effet vers la fin des années 1950 qu’il entame cette série de personnages solitaires en position frontale ou de profil. Comme dans la vie courante, la petite société créée par Lemieux est composée d’enfants, d’adolescents, d’hommes et de femmes, jeunes ou seniors. Parfois, l’artiste les prénomme, d’autres fois, ils se suffisent d’un court titre descriptif. Il a baptisé Samuel le jeune homme qui avance avec aplomb dans la vie active. Avec ses deux pupilles espacées, son délicat sourire et son regard dirigé sur l’observateur, Samuel le convoque spontanément à percer son mystère. C’est alors que notre regard se met à parcourir la surface, à explorer l’harmonie des formes géométriques et la densité de l’image, à apprécier les vibrations des touches qui rythment l’espace singulier chez Lemieux.

Peu de temps après sa réalisation, le délégué général de la province de Québec à Londres (1961-1966) fait l’acquisition de Samuel dont il ne se séparera pas. L’œuvre orne son bureau de la Délégation dans la Cité de Westminster. Elle est de retour au Canada en 1966 suivant la nomination de son propriétaire au poste de lieutenant-gouverneur de la province de Québec. L’Honorable Hugues Lapointe (1911-1982) accepte de la prêter à l’occasion de grandes expositions qui célèbrent officiellement la contribution de Lemieux à l’art canadien. Samuel participe ainsi à la Rétrospective du peintre Jean Paul Lemieux, préparée par le Musée des beaux-arts de Montréal pour souligner les fêtes du Centenaire de la Confédération en 1967, année où se tient, à Montréal, l’exposition universelle (L’Expo 67) sous le thème « Terre des Hommes ». Le caractère éminemment humaniste de la peinture de Lemieux se déploie dans les 108 œuvres exposées où sont réunis de nombreux portraits individuels fictifs autour de Samuel tels que Brigitte, Françoise (1957), Nicolas, Miss Knight (1961), Ti-Gus (1962), Axel, Nathalie (1964), Julie et l’univers (1965), etc. Sept ans plus tard, le propriétaire s’en départit une dernière fois, cédant l’œuvre de longs mois à la fameuse exposition particulière de Lemieux que le Gouvernement du Québec présente en Russie et en Europe en 1974. Dans le texte accompagnant le catalogue de cette exposition, la merveilleuse poète Anne Hébert cite le peintre classique Nicolas Poussin qui déclarait « Nous faisons un art muet ». « La nécessité sans bavardage » renchérit-elle devant les œuvres de Lemieux qui sont de l’ordre de la sensation, de l’intime et du silence. Malgré tout, la peinture traverse le temps sans une ride comme en témoigne Samuel, tendre allégorie de la vie humaine qui conserve une fraîcheur désarmante.

Tous les prix affichés sont en dollars canadiens

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